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Le premier des courts récits contemporains dont il est question dans ce livre, le Voyage au Mont-Blanc (1806), est aussi célèbre qu’il a été détesté. Privilège des œuvres de ceux qui n’aiment pas, et le proclament, ce à quoi tout le monde accorde une admiration illimitée : Chateaubriand considère le « géant » des montagnes et ne lui trouve aucune beauté. Dans le concert qui exalte le haut lieu du « sublime », sa voix se distingue en une réclamation discordante que d’aucuns passeront difficilement à l’Enchanteur en titre et que d’autres ne lui pardonneront jamais. Le second des récits, le Voyage au Mont-Vésuve, n’a pas eu les honneurs de pareille amertume. Tout porte du reste à croire qu’il a cherché à les faire oublier, tempérant par l’éloge de la lave et des cendres l’insensibilité affichée devant les splendeurs de la glace. Encore que le traitement réservé au volcan, tout d’adhésion subjective et d’une terreur apprivoisée, ne soit pas non plus conforme aux modèles qui régissent le « sentiment de la montagne ». Chacun fuit le Vésuve, Chateaubriand s’y installe : les postures une fois encore s’inversent et façonnent l’effigie d’un voyageur indocile. A l’aube du XIXe siècle, en deux lieux opposés et contre une puissante topique, Chateaubriand révise ainsi les rapports sensibles entre le moi et le « grandiose ». Et cette épreuve esthétique est aussi et fondamentalement personnelle. La poétique du voyage que Chateaubriand poursuit de « souvenirs » en « itinéraires », dans l’entrelacs obsédant de la fugacité et de la permanence qui sera le moteur des Mémoires, trouve ici une expression première. L’ombre que ces textes jumeaux projettent sur l’imaginaire des montagnes est également le fond, non moins imaginaire, sur lequel se fait jour une appropriation littéraire de soi.
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