TY - BOOK ID - 17948858 TI - La Troade : tragédie AU - Garnier, Robert AU - Beaudin, Jean-Dominique AU - Honoré Champion PY - 1999 VL - 27 5 SN - 12622842 SN - 2745301438 9782745301437 DB - UniCat KW - Trojan War KW - Hecuba, KW - Trojan War - Drama KW - Hecuba, - Queen of Troy - Drama KW - Hecuba, - Queen of Troy UR - https://www.unicat.be/uniCat?func=search&query=sysid:17948858 AB - Service des échanges Cinquième tragédie de Robert Garnier, La Troade (1579) met en scène les malheurs de la reine Hécube, de sa famille et de tout son peuple après la prise de la ville de Troie. L'auteur fait de larges emprunts à Euripide et à Sénèque, mais donne à son drame une puissante originalité : il amplifie en particulier les éléments les plus pathétiques, fait ressortir avec bonheur le tragique de la grandeur déchue ; à travers le destin ambigu d'Astyanax et l'allusion implicite aux origines troyennes légendaires de la Gaule, mythe abondamment propagé au seizième siècle, il lance un appel voilé à la reconstruction de la France déchirée par les guerres civiles. En traitant un sujet troyen dans une perspective nationale, Robert Garnier se révèle le disciple de Pierre de Ronsard : la Troade apparaît dès lors comme un hommage indirect à la Franciade. L'intérêt dramatique de la tragédie réside essentiellement dans l'accumulation des infortunes qui s'abattent sans répit sur les captives troyennes et leurs enfants : Cassandre est livrée de force à Agamemnon ; Astyanax, fils d'Hector et d'Andromaque, est précipité du haut d'une tour ; Polyxène, fille de Priam et d'Hécube, est égorgée, sacrifiée aux Mânes d'Achille ; Polydore, autre enfant d'Hécube, est assassiné par Polymestor, à qui il avait été confié. La pièce se termine par un spectacle d'horreur : les Troyennes se vengent du criminel en lui crevant les yeux et en massacrant ses enfants. Le cercle infernal de la violence et des représailles se trouve ainsi dévoilé. On mesure donc l'enjeu moral de l'oeuvre : quelles sont les bornes assignées à l'esprit de conquête et au désir de vengeance ? D'ailleurs, toutes ces calamités auraient-elles été possibles sans le déchaînement irrésistible de la cupidité et des passions ? Au milieu de tant d'atrocités, Hécube, le personnage principal, ouvre et clôt le drame. Elle incarne à la fois le désastre et l'honneur de son peuple et elle devient simultanément la figure exemplaire de la déchéance et un modèle d'héroïsme : quoique se profile la question métaphysique de la Providence, de la justice et du gouvernement divins. Garnier ne pouvait pas, dans le cadre d'une tragédie profane, donner à ce problème la réponse qu'il souhaitait. C'est dans "Les Juifves", quatre ans plus tard, qu'il pourra la fournir, mais, cette fois-ci, dans une perspective biblique et messianique. Cette pièce est un sommet de la tragédie humaniste, voire de l'histoire du genre tragique en France. On y apprécie la vivacité dramatique, la théâtralité consciemment et savamment orchestrée dans la plupart des scènes, l'émotion souvent portée au paroxysme et le climat de plus en plus oppressant de la fatalité. La hardiesse épique du style rappelle parfois l'Iliade d'Homère par sa musique et sa poésie et le théâtre d'Eschyle par la vigueur de l'expression, la violence des sentiments et la grandeur des visions. Ronsard qui, dans un sonnet liminaire, considère à juste titre Garnier comme l'émule du père de la tragédie grecque, ne s'est mépris ni sur la valeur de l'oeuvre, dont il loue le son masle et hardy, ni sur les talents épiques de son disciple, à la bouche héroïque, ni enfin sur sa virtuosité métrique et son superbe vers. ER -