TY - VIDEO ID - 134361052 TI - Phil Tippett: Des rêves et des monstres AU - Penso, Gilles AU - Poncet, Alexandre PY - 2020 PB - [Paris] : Carlotta Films, DB - UniCat UR - https://www.unicat.be/uniCat?func=search&query=sysid:134361052 AB - Animateur de stop-motion, designer et réalisateur, Phil Tippett a donné naissance à plusieurs créatures légendaires, de Jabba le Hutt aux insectes géants de Starship Troopers. Mais derrière ce brillant technicien hollywoodien, récompensé aux Oscars pour Le Retour du Jedi et Jurassic Park, il y a un artiste fou, qui passe ses journées à expérimenter dans son atelier avec tout ce qui lui passe sous la main. Bénéficiant d’un accès illimité aux collections et aux archives de Tippett Studio, ce film étudie l’héritage de Phil Tippett, depuis sa collaboration avec George Lucas jusqu’à des oeuvres plus personnelles. Gilles Penso et Alexandre Poncet vous invitent à découvrir l’insolite univers de Phil Tippet, créateur inspiré de monstres au cinéma, digne héritier de Willis O’Brien et Ray Harryhausen. Les deux réalisateurs avaient déjà œuvré dans le documentaire spécialisé, seuls ou réunis (Le Complexe de Frankenstein, Ray Harryhausen); ils s’attaquent ici à une légende des effets spéciaux, Phil Tippett, inconnu du grand public mais célèbre chez les geeks pour avoir participé à des blockbusters depuis plus de quarante ans. Héritier de Ray Harryhausen, il a magistralement utilisé la stop-motion sur Star Wars, Starship Troopers ou même le beaucoup plus récent Solo. L’approche des cinéastes se veut familière et ils ont eu de fait accès à de nombreux documents et archives intéressants, en même temps qu’au récit du protagoniste, entrecoupé de quelques intervenants prestigieux (Verhoeven, Dante) ou peu connus (notamment son épouse). Débarrassons-nous du plus gênant: ce n’est pas un portrait, mais une hagiographie. Tippett est un génie, un visionnaire, il sait tout faire mais reste modeste et donne sa chance aux jeunes. N’en jetez plus! On mentionne à peine le fait qu’il ait mis en scène le pitoyable Starship Troopers 2… Sans doute est-ce la loi du genre, mais la célébration est irritante, surtout vers la fin, avec l’inévitable valorisation par le ralenti et le concentré de compliments. Quel contraste avec l’apparente bonhomie de Tippett… Néanmoins, les néophytes feront leur miel de l’aspect pédagogique très réussi: ils n’ignoreront rien de la différence entre stop motion, motion control, go motion et images de synthèse. Démonstration visuelle à l’appui, Poncet et Penso ont le bon goût de s’adresser à un public large et, sans simplification excessive, rendent concrets ces termes spécialisés. De son côté, l’amateur éclairé se réjouira des précisions sur quelques créatures (ainsi du ED-209 de Robocop), pénétrant dans les secrets de fabrication. Les deux auteurs s’effacent derrière leur sujet en privilégiant une forme basique: récit chronologique, entrecoupé d’images d’archives et de témoignages. Presque pas d’effets (à peine de la pellicule brûlée pour symboliser le changement d’époque et les ralentis déjà évoqués). C’est à la fois la force et la limite du film; on aurait aimé par moments un petit peu plus d’inventivité, mais il y gagne en clarté. Rien ne vient détourner du sujet qui, heureusement, est suffisamment riche pour intéresser. Et même fasciner quand on réalise la minutie et la patience nécessaire, ou quand on suit les étapes d’une création. Chacun trouvera selon ses préférences matière à s’extasier; il nous semble néanmoins que le plus captivant est que, à travers la longue carrière de Tippett, on assiste à une évolution, d’abord lente, puis fulgurante quand apparaissent les dinosaures en images de synthèse. On comprend alors la brutalité de la remise en question. Même si Tippett s’en défend, on sent poindre la nostalgie du fait main (d’ailleurs Mad God, son œuvre la plus personnelle, dont on a quelques extraits, est faite à l’ancienne), de l’artisanat. Mais la différence n’est pas que technique: il est fort possible que ce que le cinéma a gagné en réalisme, il l’ait perdu en poésie.Le documentaire passe un peu vite sur la seconde partie de carrière (l’après-révolution numérique), peut-être parce qu’il n’y a plus grand-chose à montrer, à part des gens derrière un ordinateur, plus sûrement parce qu’il fallait faire des choix : privilégiant l’époque héroïque, les réalisateurs célèbrent une aventure solitaire et besogneuse plutôt que le studio actuel, usine régie par Mme Tippett, véritable businesswoman. En même temps, ce choix apporte au film une teinte mélancolique bienvenue, sans laquelle il resterait bien factuel. Tel quel, Phil Tippett, des Rêves et de Monstres est un documentaire honnête, plutôt généreux, qui a le mérite de la limpidité et sera pour beaucoup une manière agréable de découvrir un des grands créateurs du cinéma. ER -